Les défis des productrices de Jauja au Pérou
Afin de mieux comprendre les défis auxquels sont confrontés nos partenaires Sud, nous sommes partis à la rencontre de Constant Piscart, représentant d’Autre Terre au Pérou. À travers son analyse, nous prenons connaissance de l’urgence sanitaire au Pérou et de ce qu’elle a entrainé pour l’un des partenaires en particulier, le Réseau des productrices de Jauja.
Quelle est actuellement la situation sanitaire au Pérou ?
Constant Piscart – La situation est encore critique car le pays entre dans une troisième vague et compte 52.000 décès. En début d’année, le gouvernement a décidé un nouveau confinement d’une durée d’un mois et demi, beaucoup plus souple que le précédent. Le système sanitaire n’arrive pas à prendre en charge tous les patients, notamment en ce qui concerne l’oxygène à délivrer aux personnes gravement touchées. Le pays tente de réactiver progressivement, via une série de restrictions et de mesures, la vie socio-économique ; la pauvreté a augmenté de 20 à 22 %, alors qu’elle était en baisse constante ces dix dernières années.
Nous mettons aujourd’hui en lumière le Réseau des productrices de Jauja. Peux-tu nous les présenter ?
Le Réseau des productrices de Jauja est soutenu par l’institution Cedel, un partenaire avec lequel Autre Terre travaille depuis dix ans. Ce réseau rassemble 120 productrices provenant de neuf communautés, près de la ville de Jauja située à 3.400 mètres d’altitude, au centre du Pérou.
Le Réseau fait chaque jour la tournée des productrices qui lui livrent le lait de leurs vaches et le transporte en camion jusqu’à sa laiterie. Il en transforme une partie en fromage, yaourt et glace.
Nous sommes maintenant dans une nouvelle étape de transition du partenariat car c’est désormais la productrice Gérante et la responsable du renforcement qui mènent en binôme l’organisation, main dans la main avec le CA. L’implication des associées dans le travail du Réseau lors des collectes et assemblées fait partie de l’ADN du Réseau.
Quels sont les défis rencontrés aujourd’hui par le Réseau face à la crise sanitaire ?
Les productrices de Jauja n’ont pas été touchées seulement par la pandémie. Durant la crise sanitaire, des acheteurs de lait leur ont tendu un piège en leur soutirant 30 000 soles et leur ancien chauffeur s’est allié avec la concurrence. Ces deux évènements ont fortement fragilisé l’organisation interne des productrices. D’autres changements ont pourtant été très salvateurs.
Afin de rebondir, les productrices se sont entourées d’une nouvelle gérante, Aida, et d’une coach afin de mettre en place un plan d’investissement leur permettant de sortir la tête de l’eau.
Quelle est la force du projet ?
Le Réseau de Productrices est une organisation féminine qui a mis la revalorisation du rôle de la productrice andine au centre de son travail. Les productrices sont parvenues à se fédérer dans un contexte où la pauvreté – et, dans certains cas, la discrimination – touche en premier lieu les femmes. Certaines d’entre elles vivent dans des contextes précaires (femmes seules élevant leurs enfants, familles nombreuses avec plusieurs enfants à charge, productrices âgées sans droit à une pension). Elles ont fait un pas important pour doter leurs associées de moyens, connaissances et réseaux et faire ainsi un pas important vers leur autonomisation.
Comment et pourquoi les aider aujourd’hui ?
Le Réseau a aujourd’hui besoin d’être soutenu dans son élan d’autonomisation.
Son plan d’investissements prévoit l’achat d’une presse à fromage, de 100 moules à fromage, de machines pour transformer les produits laitiers et pour les emballer sous vide afin qu’ils arrivent en bon état à Lima, où le Réseau vend depuis peu ses produits. Le Réseau va développer neuf nouveaux produits ; il aura besoin pour chacun d’eux d’une autorisation sanitaire. Un consultant va nous soutenir dans le développement de produits en visitant les productrices et organisant des ateliers dans la laiterie, avec l’aide d’un stagiaire.
Il s’agit d’un projet Nord-Sud dynamique, qui porte ses fruits directement auprès d’une population en zone rurale andine. L’objectif est de permettre à ces femmes de sortir de la pauvreté et de rayonner dans toute la région, grâce à leur travail en agroécologie.
Aller plus loin
Pour en savoir plus et soutenir le projet des productrices de Jauja, rendez-vous sur le site d’Autre Terre